vendredi 28 octobre 2011

LE JOUR "J" DES ELECTIONS POUR LA CONSTITUANTE



A voté !



Le bulletin de vote : presque un journal !

Pour mon premier vote en Tunisie, je me suis rendu à Tunis même pour accomplir ce geste citoyen tant attendu et tant rêvé par beaucoup de tunisiens. Le dimanche 23 octobre j'ai fait un petit tour en voiture avec ma soeur. Et toutes les écoles devant les quelles nous étions passés depuis chez elle (la Mannouba) jusqu'à Mutuelleville, nous étions surpris de voir l'importante affluence matinale et dominicale des électeurs vers les bureaux de vote. 






Pour voter, faites la queue !


Puis je me suis rendu à mon école de la place Mandés France à Mutuelleville pour voir comment ces premières élections post révolution seraient vécues par les tunisiens. 




A mon grand étonnement, les tunisiens ont répondu présent en masse. Ce qui démontre bien leur soif de démocratie. J'étais surpris de voir dés 8 h du matin une queue longue de deux pâtés de maisons, et des rues encombrées de voitures dans tout le quartier de mon ancienne école. Cela faisait chaud au coeur. J'y suis retourné avec ma soeur pour accomplir mon devoir, et à ma grande surprise je croise à ancien camarade d'école et de quartier, devenu très jeune le premier champion incontesté des jeux aux échecs de la Tunisie : maître Slim Bouaziz.






Découragé de voir une si longue queue pour voter, il s'en retournait chez lui pour revenir plus tard dans l'après midi. Je l'ai encouragé pour m'accompagner et faire la queue comme tout le monde. 






Une autre surprise m'attendait : les tunisiens faisaient la queue parfois pendant 3 à 5 h sans rechigner, dans le calme et avec une discipline étonnante. Une ambiance de fête régnait tout le long de la queue des votants. Les gens se parlaient sans se connaître. On sent la parole  libérée : plus de méfiance des uns des autres. C'était jubilatoire de voir les tunisiens débarrassées de la peur que leur avait inoculée ZABA. 






Deux dames qui faisaient la queue avec moi,  ma soeur et mon ami Slim, se sont intégrées à notre discussion. Slim toujours original et drôle, m'apprend son engouement pour le tango qu'il découvre. Son souhait est de créer une école de tango à Tunis. Nous en avons beaucoup ri. L'une des dames m'a dit son émotion de nous voir Slim et moi évoquer notre enfance et parler de projets pour une Tunisie nouvelle; et de nous voir rire de nos souvenirs. Elle nous a dit que nous évoquions pour elle l'image même du tunisien dans sa bonhomie, sa gentillesse et sa courtoisie qui font sa spécificité alors que certains voudraient l'inclure dans d'autres identités (arabomusulmane) loin de la nôtre ; faisant allusion au discours identitaire de Ghannouchi et des siens. 
Un instant on se serait cru en mai 68. 


Au lendemain j'apprends que le taux de participation atteindrait les 90% des inscrits ! A la TV  tunisienne, un représentant de la ligue arabe disait son étonnement et sa grande surprise devant le déroulement des élections. Il disait que les tunisiens donnent une leçon aux peuples arabes : de civisme mais aussi de discipline.  
Malheureusement les forces rétrogrades (financées et soutenues par le Qatar et autres monarques saoudiens) ont eu 90 sièges sur les 217. Des analystes politiques expliquent que l'erreur faite par les démocrates progressistes était de n'avoir pas été porter leur parole auprès des gens pauvres du fin fond du pays. Ce qu'Ennahdha a su faire. D'autres parts beaucoup d'irrégularités ont été commises par ce partis en dépit des règles électorales, mais qui n'ont pas fait l'objet de poursuite en annulation du scrutin de peur, j'imagine, de victimiser ses membres ! Dans  certains centres des témoins rapportent que les personnes âgées étaient parfois accompagnées dans l'isoloir par des membres d'Ennahdha qui supervisent le "bon" déroulement des élections, pour les aider à cocher la bonne case.


J’espère que cet engouement des tunisiens pour la liberté et la démocratie sera préservé par les partis minoritaires : il leur suffit de s'unir pour faire front à Ennahdha, qui se voit déjà au pouvoir et le fait croire aux petites gens. Alors qu'il y aura d'autres rendez-vous électoraux pour les législatives et pour la présidentielle. 
Espérons aussi que les partis progressistes tireront les leçons de leurs échecs lors de ce premier rendez-vous avec les tunisiens libres.


Rachid Barnat

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